Illectronisme

Derrière ce nom étrange se cache un véritable handicap social touchant près de 13 millions de français. Qui est concerné ? Comment y remédier ? Qu’est-ce que l’illectronisme ❓ Contraction d’illettrisme et d’électronique, l’illectronisme est « l’état d’une personne qui ne maîtrise pas l’usage des ressources électroniques » (Dictionnaire le Robert). C’est-à-dire quelqu’un qui ne sait pas se servir d’un ordinateur, d’un smartphone ou encore d’internet. Si vous lisez ces mots, c’est que vous n’êtes, a priori, pas concerné·e. Mais peut-être qu’à la lecture de ce qui va suivre, vous reconnaîtrez des personnes de votre entourage. D’après Eurostat, l’illectronisme est défini par quatre compétences numériques : ▪ recherche d’informations (produits, services, administratives…), ▪ communication (mail…), ▪ résolution de problèmes (consulter un compte bancaire, copier des fichiers…), ▪ usage de logiciels (traitement de texte…). Pour un non-usage ou une compétence non-acquise, le score est de 0. Pour une acquisition de base, le score est de 1. Et avec un score de 2, vous êtes plus que basique. Un quadruple zéro vous place dans l’illectronisme. Qui est concerné·e ❓ Selon une étude menée par l’INSEE en 2019, une personne sur quatre ne sait pas s’informer sur internet et une personne sur cinq ne sait pas y communiquer. 17 % de la population française se retrouve dans l’illettrisme numérique. Vous pensez que ce chiffre ne concerne que les personnes plus âgées que l’ère numérique ? Une partie, oui, bien sûr. Mais pas seulement ! En suivant les résultats d’un sondage, le CSA a classé la population selon leur type de relation au numérique. ▪ Les plus impactés sont les « déconnectés » (4 %), ils sont exclus numériquement, que ce soit pour l’équipement (zones blanches) ou à cause de problèmes financiers. ▪ Viennent ensuite les « réfractaires » (11 %), qui ne sont pas intéressés ni concernés par la technologie numérique. On y retrouve un certain nombre de retraités par exemple. ▪ Puis les « déconnectés » (4 %), ils sont équipés mais ne se sentent pas à l’aise. Ils sont souvent volontaires pour se former, pour apprendre à mieux maîtriser. ▪ Ces groupes s’opposent aux « aguerris » (54 %) et aux « volontaires » (25 %) qui ont accès aux équipements et gèrent plutôt bien, voire même très bien, les outils. Quelle évolution ❓ Bien sûr depuis ces études il y a eu une pandémie, des confinements, le développement du télétravail et de la visioconférence. Selon le Baromètre annuel du numérique, pour l’année 2022, plus d’un français sur deux estime mieux maîtriser les outils du numérique du quotidien depuis deux ans. Il y a d’ailleurs eu un boom des objets connectés en tout genre (tablettes, enceintes, montres, etc.) et la fibre étend ces connexions un peu plus chaque jour. Mais, en parallèle, ce développement relègue encore plus loin ceux qui ne sont pas familier du tout numérique. Lorsque la question des freins reconnus pour le développement numérique est posée, il en ressort : ▪ le manque de maîtrise des outils (25 %), ▪ un équipement obsolète (12 %), ▪ un accès à internet difficile (9 %), ▪ un non-équipement (11 %) – éventuellement volontaire. Plus le numérique se développe, plus il se complexifie. Et donc, plus l’écart se creuse. Pour preuve, les délégués et juristes du Défenseur des droits (lien : www.defenseurdesdroits.fr) constatent quant à eux une forte hausse des réclamations. Pourquoi ? Tout simplement à cause de la dématérialisation des démarches administratives. Si vous n’arrivez pas à gérer internet, vous ne pouvez, aujourd’hui, effectuer certaines démarches essentielles. Vous objecterez peut-être que 17 % de la population française, ce n’est pas tant que ça. D’autant plus si, parmi eux, certains le sont volontairement. Il n’y a donc pas lieu de s’inquiéter ! Mais savez-vous que l’impact de cet illectronisme se ressent au quotidien ? Fracture numérique : quelles conséquences ❓ En effet, 250 démarches administratives parmi les plus courantes se font à présent uniquement en ligne, l’objectif est d’atteindre les 500, voire le tout numérique. L’illectronisme amène donc à l’incapacité de se servir de l’e-administration, ce qui résulte à la non-demande de droits, de prestations, etc. pour une plus grande précarisation. C’est également renoncer à quelque chose car cela nécessite un ordinateur ou internet. Combien de fois par jour, vous en servez-vous sans même vous poser la question ? C’est donc une contrainte quotidienne. Tout ceci procure un sentiment d’isolement, de décalage avec le monde. La perte d’autonomie peut conduire à une diminution de la confiance en soi. Il s’agit donc d’un véritable handicap social. L’ANLCI - Agence Nationale de Lutte Contre l’Illettrisme - le définit comme un « double-illettrisme » et fait un véritable enjeu de l’inclusion numérique. Elle le place d’ailleurs comme prioritaire au même titre que les compétences de littératie (lecture et écriture) et de numératie (mathématiques). Dans la même idée, l’ONU a reconnu un Droit d’accès universel au numérique. Nous en sommes encore loin, mais ce n’est pas une fatalité. Des solutions existent déjà et se mettent en place. Quelles solutions sont proposées ❓ L’ANLCI recommande l’accompagnement et la formation au compétences numériques, dans une démarche pédagogique. À ce titre des associations telles que Emmaus connect et We tech care proposent des cours, des permanences d’accompagnement aux numérique. Ensemble, elles ont créé Les Bons Clics pour former les aidants numériques, en leur proposant des activités. Apparaissent également des digitrucks qui sillonnent la France pour lutter contre l’exclusion numérique. Le gouvernement a, quant à lui, misé sur la fermeture progressive des différentes agences administratives, remplacées par l’ouverture de guichets France Services, dans lesquels des accompagnants tiennent des permanences pour effectuer les démarches en ligne. De nombreuses formation en ligne existent pour les particuliers et les entreprises, en toute autonomie, mais encore faut-il être capable de les trouver, de se connecter. Et comme toujours l’entr’aide familiale, amicale, de voisinage occupe la première place dans cette solidarité humanitaire. Quel rapport avec l’écrivain public ❓ Tout simplement parce que l’aide administrative, la rédaction de courriers font partie, entre autres, des aptitudes du métier. Lorsque les mairies coopèrent, des permanences d’écrivain public peuvent être proposées, gratuites pour l’usager. Sinon il faut les contacter directement, et payer. À ce propos, n’oubliez pas : les déclarations d’impôts 2023 pour les revenus de 2022 se font en ligne dès maintenant et jusqu’au 25 mai (départements 1 à 19), 1 juin (départements 20 à 54), 8 juin (départements 55 à 974/976). Pour les personnes dans l’impossibilité de le faire en ligne - donc en situation d’illectronisme – qui sont autorisées à garder la version papier, la date limite est le 22 mai 2023. Vous vous sentez concerné·e ? Vous connaissez quelqu’un que ça pourrait aider ? Contactez-moi : ☎ 07 60 78 31 64 📧 isabelle.ecrivainepublique@gmail.com Sources et liens : Étude INSEE de 2019 : https://www.insee.fr/fr/statistiques/4241397 Site Agence Nationale de Lutte Contre l’Illettrisme : http://www.anlci.gouv.fr/ Article sur l’illectronisme : https://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2022-1-page-33.htm Enquête sur l’illectronisme en France, CSA, 2018 : https://sps.fr/wp-content/uploads/2018/06/Typologie_Illectronistes_110518.pdf Site défenseurs des droits : https://www.defenseurdesdroits.fr Le baromètre du numérique 2022 par l’ARCEP : https://www.arcep.fr/cartes-et-donnees/nos-publications-chiffrees/barometre-du-numerique/le-barometre-du-numerique.html Baromètre 2022 en détail : https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/rapport-barometre-numerique-edition-2022-Rapport.pdf Page France Services du gouvernement : https://www.economie.gouv.fr/particuliers/france-services# Site Les Bon Clics pour les aidants numériques : https://www.lesbonsclics.fr/fr/

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